lundi 5 novembre 2012

LES DESSOUS DE LA « JUSTICE » FRANCAISE EN MARTINIQUE (A propos d'un article de « Libération »)



Voici ce que publie le journal « Libération » dans sa livraison du samedi  3 novembre 2012. On apprend ainsi comment la hiérarchie fait pression sur des fonctionnaires pour étouffer certaines affaires.

TOTALITE DE L’ARTICLE :

« Déontologie . Aux Antilles, un fonctionnaire risque une sanction pour avoir dénoncé une mairie.

Par RENAUD LECADRE

Un fonctionnaire a-t-il encore le droit de dénoncer, de son propre chef, des faits potentiellement délictueux au parquet ? L’article 40 du code pénal fait obligation à «tout officier public qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou délit, d’en donner avis sans délai au procureur de la République». Dans sa simplicité, la loi parle de «toute autorité» ou de «tout fonctionnaire», sans que le second n’ait besoin du feu vert de la première.

Grand machin. Cas pratique avec Eric Avril, fonctionnaire aux Antilles, convoqué lundi par sa hiérarchie pour crime de lèse-majesté : avoir actionné l’article 40 sans en référer en haut lieu. C’est un ancien de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), désormais fusionnée avec la Direction du travail et de l’emploi en un nouveau conglomérat administratif, la Dieccte (Direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). Les ex de la DGCCRF, rompus à chicaner les entreprises, ont peu apprécié d’être sous la coupe d’un grand machin qu’ils soupçonnent d’être plus soucieux de préserver la paix sociale que de réprimer les fraudes.

Début octobre, Eric Avril alerte donc le parquet de Fort-de-France (Martinique). Ce n’est pourtant pas l’affaire du siècle : à propos d’un marché de construction sur la commune de Case-Pilote, dirigée par un cacique local de l’UMP, il s’étonne qu’une entreprise locale n’ait toujours pas été payée alors que l’Etat français avait débloqué les fonds dans le cadre de son plan de relance. La mairie aurait-elle conservé une partie de l’argent, au risque d’entraîner la faillite d’un entrepreneur local ? Simple soupçon qu’Eric Avril transmet au parquet sous couvert d’article 40.

La réaction du procureur, Claude Bellenger, est étonnante. Il écrit illico à la Dieccte : «J’ai l’honneur de vous faire retour du dossier transmis directement par l’un de vos fonctionnaires, sans passer par la voie hiérarchique. Ce comportement ne me paraît pas conforme à la déontologie élémentaire d’un fonctionnaire.» Et la Dieccte de convoquer dans la foulée Eric Avril pour une explication de gravure,«avec la possibilité de vous faire accompagner par un représentant du personnel», prélude à une procédure disciplinaire.

«Hypocrisie». Les syndicats FO et CGT sont vent debout : «Pressions, avertissements, mesures de rétorsion, voila le sort réservé aux fonctionnaires qui font leur boulot. Tout fonctionnaire a pourtant le devoir d’informer le procureur. Qui veut-on protéger ? Pourquoi une telle hypocrisie sous le fallacieux prétexte qu’il n’aurait pas respecté la voix hiérarchique ?» Une collègue raconte la suite : «On lui a retiré de façon arbitraire toutes ses prérogatives, on ne lui donne plus d’enquête, tout qu’il peut faire est contesté» , bafouant la lettre comme l’esprit de la loi. »

Madame Taubira et le gouvernement socialiste se décideront-ils à mettre enfin un terme à ces dérives dans les départements-colonies ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire