dimanche 17 juin 2012

HAITI-ONG : UN RENDEZ -VOUS MANQUÉ




Chez nous, les beaux et extrêmement expressifs proverbes à couleur locale ne manquent pas. Deux d’entre eux reviennent constamment dans ma mémoire et souventes fois, il m’arrive de les utiliser: tellement ils tombent à propos, tellement ils répondent bien au contexte, à l’esprit du sujet à traiter. Ils se ressemblent et n’était une légère nuance, on pourrait même dire du pareil au même. ‘’Lavé main suyé à tè’’ serait-il différent ou pareil à ‘’Couri pou lapli tombé nan bassin dlo’’. Aux tatillons d’apporter les précisions y relatives. Cependant, ces deux savoureux proverbes, que ce soit en français ou en créole, répondent avec exactitude au cas d’Haïti en ce qui concerne les ONG.

Les ONG ce sont des organisations non gouvernementales nées de la nécessité, à une époque donnée, de vouloir protéger l’aide internationale en cherchant à la mettre à l’abri de la voracité d’un gouvernement trop gourmand qui allait à bouchées doubles dans l’assiette économique du pays. En ce temps là, toutes les recettes de l’État, tous les sous offerts par l’étranger et destinés à diriger Haïti vers les rails du développement étaient engloutis dans les poches des hommes et des femmes au pouvoir, plus précisément dans celles de la famille présidentielle qui considérait les biens de l’État comme ses biens propres. Ce genre de vol systématique, de pillage institutionnalisé, devenu intolérable, insupportable, devait déboucher sur un bris de confiance qui a porté les bailleurs de fonds à couper court à cette pratique insultante et inadmissible. Ils ont finalement décidé d’administrer autrement les fonds d’aide. Ils ont pensé à confier de préférence l’assistance à des mains autres que celles des vautours du gouvernement. Ainsi ont pris naissance les ONG qui se sont multipliées à un rythme étourdissant, qui ont poussé comme des champignons. Elles se sont imposées en dépit de la volonté soutenue du ministère de la Planification d’exercer un contrôle sur leurs activités tenues, jusqu’à date, imperméables par les nouveaux gardiens des caisses. Il faut dire aussi que ce nouveau système a été et est encore toléré par les bailleurs de fonds eux-mêmes car cela fait leur affaire. Il leur est plus loisible de reprendre en grande partie, avec la main gauche, ce qu’ils ont donné avec la main droite. Ainsi donc, loin d’apporter, un correctif, une solution aux nombreux problèmes de notre pays extrêmement pauvre, ces ONG sont venues aggraver la situation. Elles sont le repère des prêtres, des religieuses, des missionnaires, des parlementaires, des pasteurs rapaces, apaches, satrapes dont le seul souci est de s’enrichir éperdument sans se souvenir que la richesse conduit à coup sûr vers la luxure qui est un péché mortel. Voulant peut être bien faire, nos aidants, dits amis, nous ont mis dans le pétrin avec ces nouveaux millionnaires qui ont jeté Haïti dans un état de disfonctionnement dans lequel elle aura du mal à sortir. L’idée d’ONG, en soi, n’était pas mauvaise mais le choix de son application était piètre et irréaliste. Le fond était peut être beau mais le coup n’est point bon car livrer, sans contrôle, de l’argent à en veux-tu en voilà est loin d’être géniale. Elle tient plutôt d’un manque de jugement complice et coupable. En aucun cas, on ne doit pas tenter le diable. Ce qui est grave c’est que toutes ces sommes volatilisées sont inscrites dans la rubrique : AIDE À HAITI - DETTES D’HAITI.

De la gabegie gouvernementale à la gestion frauduleuse des ONG on n’est même pas autorisé à dire que c’est du blanc bonnet - bonnet blanc tellement le fossé est grand. La plaie laissée dans les entrailles de notre économie par ces faux ‘’développeurs’’ est bien plus profonde, bien plus ulcéreuse et putride que celle jadis causée par les nombreuses et abusives ponctions faites au trésor public par nos anciens fossoyeurs de la patrie. Le mieux est de parler de ‘’se laver les mains pour les essuyer par terre’’ ou mieux ‘’fuir la pluie pour se refugier dans un fleuve‘’. Ce qui revient à avancer, sans crainte d’être contredit, que confier l’aide aux ONG a été la pire décision à prendre. C’est demander au chat de surveiller son beurre ou d’organiser le bal des rats. Ce bal a pourtant eu lieu et dans le corridor de la tentation la fête a réussi. Elle a été belle pour les ‘’ONGistes’’ et leurs complices. Mais elle est encore cauchemardesque pour les crèves la faim qui meurent chaque soir dans un sombre tableau d’hypoglycémie.


Au nom de toutes les haïtiennes, de tous les haïtiens, je demande au gouvernement MARTELLY-LAMOTHE de conjuguer ses efforts aux fins de prouver à nos aidants que les choses vont changer, que nous avons la ferme volonté de divorcer d’avec l’ancien système qui priorisait le vol sur le développement. De prendre l’engagement solennel devant le pays et devant le monde de faire en sorte que l’État haïtien qui, semble-t-il, est actuellement représenté par des hommes et des femmes honnêtes soit dorénavant perçu comme étant une nouvelle nation digne de confiance, capable d’administrer, dans la transparence, le bien public. Feu Président dominicain J. BALAGER avait pris pareille disposition et cela a porté fruit chez lui. Le petit oiseau a besoin d’aide pour apprendre à voler mais ceci une fois fait, il prend son élan de par lui-même. Nous avons encore besoin d’appui, d'accompagnement, c’est certain, pour pouvoir un jour voler de nos propres ailes. Mais si nous gardons cette aide sans l’utiliser à bon escient pour le développement socio économique de notre coin de terre, nous resterons toujours tributaires de l’assistanat et de la mendicité dégradante.


Amis qui nous tendez la main, au nom de toutes les haïtiennes, de tous les haïtiens, je vous demande encore une fois de nous accorder le bénéfice du doute. L’homme est perfectible. Prenez une nouvelle fois sinon le risque du moins la chance de confier la gestion des fonds d'assistance au gouvernement et non aux dilapidatrices ONG. Malgré leur inexpérience génératrice d'erreurs en cascade, les nouveaux hommes et femmes au pouvoir dénotent, il faut le dire, une certaine volonté de bien faire et de combattre la corruption qui est ce grand mal qui ronge les conduits vitaux du développement national. Et quand Haïti, grâce au développement touristique, grâce à la création d’emplois, grâce au reboisement par la culture fruitière, grâce à la volonté populaire, grâce aux efforts et au sérieux des dirigeants, grâce aussi à votre généreuse contribution aura retrouvé son nord, vous aurez la grande satisfaction d’avoir pris une décision logique empreinte d’une réelle volonté de voler au secours d’un peuple qui veut vivre . 


 QUE DIEU BENISSE HAITI 


 Maurice CELESTIN - LECHAPEAUTEUR

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