vendredi 10 juin 2011

Les Allemands? Moins travailleurs… et plus performants

Alors que le débat reste ouvert en France sur la question du "travailler plus" comme sur celle du coût du travail et que la chancelière allemande Angela Merkel voit dans le"travailler moins" des Européens du Sud l'une des sources de leurs difficultés économiques, Patrick Artus, économiste en chef de Natixis, a publié coup sur coup deux études qui incitent à se méfier des idées simples sur les liens entre durée du travail et compétitivité.
La première (cfFlash Economie n° 401) montre que les Européens du sud travaillent nettement plus que les Allemands. La durée annuelle du travail est de 2 119 heures en Grèce, 1 654 heures en Espagne, 1 554 heures en France et seulement 1 390 heures en Allemagne.
De même, et quelles que soient les différences de législation en matière d'âge légal de la retraite, l'âge effectif moyen de départ à la retraite est quasiment le même en Allemagne (62,2 ans) qu'en Espagne (61,5), au Portugal (62,6) ou en Grèce (61,5). Seule la France (60 ans) est encore à la traîne.
Le directeur de la recherche et des études économiques de Natixis en tire la conclusion que l'avantage économique de l'Allemagne par rapport aux pays du sud de la zone euro ne vient donc pas du temps de travail. Les Allemands, insiste-t-il, travaillent beaucoup moins, et pas plus intensément que les Latins (dont la productivité est globalement comparable à celle de leurs collègues d'Outre-Rhin).
La performance allemande, analyse M. Artus chiffres à l'appui, est à chercher aiileurs : dans son effort d'innovation et dans le taux d'épargne plus élevé de ses ménages et de ses entreprises. En revanche, le coût du travail n'est pas discriminant (sauf avec la France où le salaire horaire "chargé" dans l'industrie est de 33,7 euros contre 30,2 en Allemagne), pas plus d'ailleurs que la qualité de la main d'oeuvre (sauf avec l'Italie et le Portugal).
Par ailleurs, dans une seconde étude, qui a été également publiée le 30 mai (Flash Economie N° 403), l'économiste s'intéresse aux effets de la fiscalité sur le taux d'emploi et le taux de chômage. A partir d'une analyse empirique de la situation de 20 pays de l'OCDE, il montre que "seuls deux impôts semblent avoir un effet négatif significatif sur la situation du marché du travail : les charges sociales des employeurs et le taux marginal d'impôt sur le revenu".
Dans une déclaration commune intitulée "Compétitivité : dépasser les approches idélogiques", rendue publique le 8 juin, trois organisations syndicales d'employeurs (CGPME, Medef, UPA) et trois organisations syndicales de salariés (CFDT, CFTC, CFE-CGC) ont reconnu ensemble pour la première fois que se posait en France "la question de la structure des prélèvements obligatoires qui pèsent (...) plus qu'ailleurs sur les facteurs de production, et en particulier sur le travail".
"Un vrai débat sur les modes de financement de la protection sociale est (...) à engager. Une réflexion approfondie et globale sur une nouvelle répartition entre ce qui doit être payé par la solidarité nationale (l'impôt) et ce qui doit être pris en charge par la solidarité professionnelle (les cotisations sociales), constituerait sans doute une méthode à explorer", ajoutent les signataires de cette déclaration, qui se gardent bien d'agiter le chiffon rouge de la TVA sociale.

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